Le 3 juillet près de 2 000 personnes se sont rassemblées à Paris à l’initiative de « Agir ensemble » pour défendre la République. Trois grands thèmes ont structuré cette soirée : la haine des juifs et d’Israël, le soutien aux victimes mortes ou otages du 7 octobre et enfin le combat de l’Occident contre l’islamisme.
Emotion, sobriété, colère, réflexion, inquiétude, détermination, lyrisme, tous ces ingrédients étaient au coeur de la soirée « Agir ensemble pour dire non » organisée le 3 juillet à la Mutualité à Paris. Devant une salle comble, 25 intervenants - juifs, musulmans, chrétiens ou athées, Français ou pas, hommes et femmes, universitaires, journalistes, écrivains, diplomate, avocats … - furent tous aussi concis qu’engagés. La soirée, bien rythmée entre panels de discussions, vidéos courtes et tribunes individuelles, a passé vite. Pourtant, elle a duré plus de trois heures ! Un temps dédié à dire « non à l’effacement des crimes abominables du 7 octobre, non à la haine des juifs et d’Israël, non aux extrêmes qui flétrissent notre république, non aux islamistes qui veulent détruire nos sociétés » selon les termes d’Arié Bensemhoun, directeur d’Elnet France. Dans un même souffle, ce dernier a aussi souligné qu’il s’agissait de dire « oui à la résistance, oui au combat pour la vérité, oui à l’avenir de cette république qui est notre maison commune et qui mérite que nous nous battions pour elle. » (1)
« Il n’y a pas de petits actes antisémites »
Bien que l’évènement, organisé de longue date, se tenait fortuitement quatre jours avant le deuxième tour des législatives, il tombait à pic pour dénoncer les extrêmes, à droite comme à gauche, ce que beaucoup ont fait de Jonathan Arfi à Hassen Chalghoumi, en passant par Alain Finkielkraut, Abnousse Shalmani, Michaël Prazan, Sylvain Tesson, Michel Houellebecq et bien d’autres. A la fin de la soirée, Raphaël Enthoven, particulièrement lyrique, a dénoncé la « bête infime au sens où l’antisémitisme est comme une bête miniature, comme un virus », un mal sournois, parfois difficile à débusquer, « un bacille qui passe à travers les filets de la loi », raison pour laquelle il faut le combattre « sur le terrain de l’opinion plus que devant les tribunaux ». Cependant, Muriel Ouaknine Melki, toute aussi convaincante, avocate de la fillette de 12 ans violée le 12 juin à Courbevoie par des jeunes de son âge parce que juive, a enjoint le public à dénoncer tous les actes antisémites auprès de l’Organisation Juive Européenne, qui relaie les plaintes devant la justice, car dit-elle, « il n’y a pas de petits actes antisémites ». Et elle a promis de porter « haut et fort » la parole de cette enfant violée, car « si nous nous maintenons ici, en France, dans ce pays que nous aimons tant » il n’est pas question de le faire « la tête baissée en rasant les murs. »
Cette soirée fut aussi l’occasion de marquer solennellement la sortie d’un ouvrage « 7 octobre : Manifeste contre l’effacement d’un crime » (1), qui réunit plus de 80 contributions de Haïm Korsia à Serge Klarsfeld en passant par Michel Onfray, Boulem Sansal ou Mario Stasi. Et justement pour lutter contre cette tentative d’effacement, chaque ouvrage est dédié à l’une des 1 160 victimes du 7 octobre, dont 42 Français, avec le rappel de son nom et quelques lignes sur sa vie et les conditions de sa mort. L’éditeur, David Reinharc, précise que l’objectif est de « redonner son unicité, son visage, son histoire » à chacune de ces victimes. Cette démarche n’est pas sans rappeler le Mur des Noms, à l’entrée du Mémorial de la Shoah dans le Marais, qui inscrit le nom des 75 568 juifs dont 11 400 enfants, déportés depuis la France et jamais revenus.
Le témoignage poignant d’Ayelet, mère d’une otage à Gaza
Paroxysme de l’émotion de cette soirée, le témoignage d’Ayelet Lévy Shahar, la mère de Naama, l’une des 121 otages encore retenus à Gaza, dont 37 seraient morts selon l’armée israélienne. Naama a eu 20 ans à Gaza le 22 juin. Elle est retenue par le Hamas depuis le 7 octobre. Ce matin-là, elle a été enlevée sur la base militaire du kibboutz Nahal Oz. Dès 10 heures du matin, des images de la jeune fille blessée sont diffusées sur le net comme des trophées par le mouvement islamiste. Depuis, sa famille l’attend. Sa mère, accueillie par une longue standing ovation, est venue parler de sa fille lumineuse, sportive, engagée dans le mouvement de coexistence Hands of Peace, raconter cet interminable calvaire et demander de l’aide, notre aide, celle de la France. « Neuf mois ont passé. On passe de l’espoir au désespoir, mais on ne cède pas au désespoir », confie-t-elle en hébreu, avec force et dignité. Sa voix est douce, retenue. Parfois, elle cherche ses mots, manque de souffle ; l’émotion et l’angoisse coupent sa respiration. Mais, elle ne pleure pas. « C’est la responsabilité de notre pays, de notre gouvernement de sauver ses citoyens qui sont retenus en otages. Mais, en raison de la complexité de la situation et de cette organisation terroriste sur laquelle nous n’avons absolument aucun pouvoir, nous avons besoin de l’appui de pays forts comme la France. Que tous ceux qui peuvent avoir une influence en usent. Nous avons besoin de votre aide pour faire revenir ma fille et tous les otages. »
« le 7 octobre, c’est Daesh »
Enfin, au cœur de cette soirée, la nature du combat qui oppose Israël au Hamas et plus largement l’Occident à l’Islam. Les plus virulents à l’égard du Hamas furent deux invités arabes, qui ont davantage les moyens culturels de décoder ce qui est dit et fait au nom de l’islam par le Hamas, mais aussi le Hezbollah, Daech, Boko Aram, … Pour Mosab Hassan Yousef, fils d’un fondateur du Hamas et Rawan Osman, syro-libanaise, l’objectif ultime du Hamas n’est pas la conquête de la Palestine ou de Jérusalem, mais celle de l’Occident. Rawan Osman, fondatrice de Arabs Ask a rappelé que le 7 octobre 2001, Oussama Ben Laden diffusait sur Al Jazeera un appel contre les ennemis de l’islam, à savoir « l’Occident et Israël » exactement comme l’a fait le Hamas le 7 octobre dernier. « Leur objectif commun est de répandre la loi de l’islam et de vaincre les infidèles, les ‘’kouffar’’». Pour le Père Patrick Desbois, qui travaille en Irak depuis près de dix ans auprès des Yezidis, persécutés par Daesh car considérés comme des kouffar, il ne fait aucun doute que « le 7 octobre, c’est Daesh. La même méthodologie. Tout est légal parce que les juifs sont vus comme des kouffar » : jeter les bébés, violer les femmes, démembrer des êtres humains … tout est permis pour punir les mécréants. Pour l’ancien responsable du service national pour les relations avec le judaïsme de la conférence des évêques de France, « l’antisémitisme n’est pas une liberté de point de vue, c’est une idéologie criminelle. »
Judith Meyer
(1) Pour visionner l’ensemble de cette soirée, cliquez ici : https://youtu.be/vFu8vpspge0?si=9ZpC8nlsXP92bPzm
(2) Editions David Reinharc, 20 €. Pour commander cet ouvrage, cliquez ici : https://7octobre.dr-editions.fr
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