L’ÉDITO DE LUC DE BAROCHEZ. Les Occidentaux gobent une propagande présentant comme « résistant » un mouvement dictatorial, réactionnaire et fauteur de guerre.
Les derniers jours furent instructifs au Proche-Orient. Le Hamas a rejeté, le 12 juin, les dernières propositions de cessez-le-feu des médiateurs américano-qataris. Celles-ci reprenaient pourtant l'essentiel de ses exigences. Israël les avait entérinées et le Conseil de sécurité de l'ONU, pour une fois, les avait avalisées à l'unanimité.
On a aussi appris que des otages israéliens étaient détenus par des familles de Gaza, y compris par celle d'un prétendu « journaliste » dont les écrits pour le média The Palestine Chronicle dénonçaient le destin tragique des victimes palestiniennes. Ainsi, le mouvement islamiste paye des civils pour garder les Israéliens qu'il a capturés par dizaines lors de sa razzia sanglante du 7 Octobre. Il n'ignore pas que retenir des otages dans un appartement privé, c'est transformer celui-ci en cible militaire légitime.
Après le rejet du cessez-le-feu par Yahya Sinwar, le dirigeant du Hamas à Gaza, le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, s'est demandé benoîtement si celui-ci négociait « de bonne foi ». Vraiment ? Sinwar, 61 ans, dont vingt-deux passés dans les prisons israéliennes, est, beaucoup plus que Benyamin Netanyahou, le personnage central de ce conflit. C'est lui qui a déclenché les hostilités le 7 octobre, en envoyant ses sbires commettre des atrocités innommables dans des localités israéliennes proches de Gaza. C'est lui qui orchestre le déroulement des hostilités au plus près des civils afin de s'en servir comme boucliers humains. Et tant pis (ou tant mieux !) s'ils meurent.
Tapi, pense-t-on, plusieurs étages sous terre, au fond du tentaculaire réseau de tunnels creusé par ses partisans, il ne craint rien des bombes israéliennes. Comme l'a observé l'écrivaine germano-roumaine Herta Müller, Prix Nobel de littérature, dans un remarquable discours prononcé le 25 mai à Stockholm, « Israël a besoin de ses armes pour protéger sa population, le Hamas a besoin de sa population pour protéger ses armes ».
« Sacrifices nécessaires »
Pour entrer dans la logique mortifère de Sinwar, il faut comprendre que son objectif n'est ni la paix ni même le retour au calme, mais l'amplification du chaos. Le quotidien américain Wall Street Journal a eu accès à plusieurs dizaines de messages qu'il a envoyés ces derniers mois aux négociateurs de l'improbable cessez-le-feu au Qatar. Le chef terroriste s'y montre persuadé que l'État juif a plus à perdre que le mouvement islamiste de la continuation des combats. Il y fait preuve d'un mépris absolu pour la vie de ses concitoyens. Il évoque froidement les « sacrifices nécessaires » de Palestiniens, qu'il compare aux morts de la guerre d'indépendance algérienne contre la France (1954-1962).
Sinwar avait raison de penser que la politique israélienne de ne jamais abandonner les otages capturés par l'ennemi allait inévitablement attirer Tsahal dans le piège de Gaza ; que l'opinion publique occidentale allait se scandaliser des images diffusées sur les réseaux sociaux ; qu'elle ferait, au bout du compte, porter toute la responsabilité des combats sur Israël. « Les Israéliens font exactement ce que nous voulons », a écrit Sinwar à ses interlocuteurs à Doha.
Les Occidentaux, eux aussi, font le jeu du Hamas. Ils se laissent abuser par une propagande dépeignant un mouvement dictatorial, réactionnaire et fauteur de guerre sous les traits d'un organe de « résistance » qui représenterait légitimement la cause de Palestiniens opprimés. Pourtant, depuis sa prise de pouvoir en 2007 à Gaza, c'est lui, l'oppresseur ! C'est lui qui a instauré son règne de terreur en jetant ses opposants vivants, pieds et poings liés, du haut d'un immeuble de quinze étages. Mais au travers du prisme déformant de la lutte « anticoloniale », ces tyrans deviennent des sauveurs.
Le Hamas n'a pas seulement pris la responsabilité d'une guerre désastreuse avec Israël. Il manipule, avec succès, nos opinions publiques occidentales. Que tant de responsables politiques de centre gauche aient accepté ces derniers jours de s'unir avec La France insoumise au sein d'un nouveau « Front populaire », après la violente campagne anti-israélienne que le mouvement de Jean-Luc Mélenchon a menée ces derniers mois, témoigne des avancées de la propagande islamiste dans un pays pourtant frappé à plusieurs reprises par les escadrons de la mort djihadistes.
Il ne manque plus que les Français abusés élisent des cohortes de députés antisémites à la nouvelle Assemblée nationale le 7 juillet pour que le triomphe du Hamas soit complet.
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